Elle, broyée, lui, gavé

Le foie gras est un foie atteint de stéatose hépatique. Plus de 40 millions de canards sont rendus malades par un gavage subi durant deux semaines.

Les canetons femelles, eux, sont en grande majorité broyés à la naissance, parce que leur foie est considéré comme… « moins bon ». Pour les oies, aux alentours de 700 000, le gavage dure trois semaines. Un tube de métal de 20 à 30 centimètres, ou embuc, est enfoncé plusieurs fois par jour jusque dans le jabot (partie de l’œsophage) de ces oiseaux, qui sont forcés d’ingérer une quantité de maïs telle (entre 450 g et 1 kilo) que leur foie finit par atteindre presque dix fois sa taille normale. Le taux de mortalité est huit fois plus élevé qu’en période d’élevage : environ 1,5 million d’entre eux en meurent, parce qu’ils ne peuvent pas résister à un tel traitement. Outre les lésions et les douleurs provoquées par l’enfoncement du tube dans la gorge, la suralimentation est elle-même source de maladies.

Faux gras dans tous les plats !

Parqués dans des cages, maintenant collectives pour la plupart, ils ne peuvent pas gratter la terre, ni se baigner. En plus des intolérables souffrances qui leur sont infligées, c’est la négation même de leur état d’animaux aquatiques. Et pourtant : « Tout animal étant un être sensible doit être placé […] dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce » (article L214-1 du Code rural français). Pour info, les magrets vendus proviennent de ces canards.

L’Allemagne, l’Argentine, l’Autriche, le Danemark, l’Italie, Israël, la Norvège, la Pologne et la République tchèque ont depuis longtemps interdit cette torture. La Californie les a rejoints en janvier 2019, par décision de la Cour suprême. Intéressant : « Beaucoup de pays n’ont même pas jugé nécessaire d’adopter une loi interdisant explicitement le gavage : il y est illégal simplement au regard des lois qui protègent les animaux contre les mauvais traitements. » En effet, « Aucun animal n’est alimenté ou abreuvé de telle sorte qu’il en résulte des souffrances ou des dommages inutiles », selon l’article 14 de la directive européenne de 1998. Aux États-Unis, en novembre dernier, un distributeur de foie gras a été attaqué pour « publicité mensongère »…

Les « fêtes » sont terminées. Mais cet article n’est malheureusement pas obsolète. Avec l’espoir qu’il le sera un jour… prochain.
Luce Lapin