La corrida portugaise : l’hypocrisie en plus… et la mort en douce
Les corridas ne vivent que grâce aux touristes, français ou étrangers, qui s’y rendent par simple curiosité, « pour voir ». Nombreux sont ceux qui, écœurés et révoltés par ce spectacle d’un autre âge, indigne de notre xxie siècle prétendument humaniste, n’y retourneront jamais. Malheureusement, cette unique fois contribue à alimenter la manne financière des organisateurs, s’ajoutant, dans les villes taurines — soit quelque 70 villes et villages en France —, à l’argent pris aux contribuables, sans qu’on leur ait demandé leur avis. Bien sûr, vous savez tout cela et ne vous en laisserez pas conter. Mais peut-être vous laisserez-vous convaincre d’assister à une corrida portugaise, puisque, vous assurera-t-on pour vous décider, la portugaise, ou tourada, qui se pratique à cheval — non caparaçonné, donc encore moins protégé que dans la corrida de rejón —, sans picador, se déroule sans mise à mort dans l’arène : au Portugal, c’est interdit. C’est une façon détournée et éhontée de dissimuler la réalité. Aucune surprise, les aficionados sont depuis longtemps et définitivement passés maîtres dans l’« art » de la tromperie…
La portugaise, malheureusement de plus en plus à la mode en France aujourd’hui, c’est la corrida version light — c’est du moins ce qu’on voudrait nous faire accroire. Tout comme dans l’espagnole, les taureaux subissent préalablement l’afeitado, qui consiste à leur scier les cornes à vif. Le public y est supposé encore plus familial… Ce que voit le public : un cavalier plante des farpas (sorte de banderilles à double harpon) sur le dos du taureau. Quand l’animal, profondément blessé, est épuisé par le sang perdu, huit hommes, les forcados, à pied quant à eux pour la « finale », entrent en piste et l’immobilisent. Le dernier arrivé attrape la queue du taureau et la maintient fermement, en s’y accrochant. Ça, oui, le taureau sort vivant de l’arène… mais dans quel état ! Aucune anesthésie ne sera pratiquée pour enlever les banderilles, qui seront arrachées à l’animal harponné. Ce qui n’est pas montré : le taureau est ensuite emmené dans les coulisses, où, dans le meilleur des cas, si je puis dire, il est achevé à coups de poignard. Le plus souvent, il agonise jusqu’à l’ouverture de l’abattoir le lendemain. C’est beau, le « sens de la famille », qui consiste à emmener ses petits assister à la mise en scène d’un herbivore magnifique torturé par des brutes machistes vêtues du ridicule « habit de lumière », que ses tortionnaires prétendent « aimer » au nom d’une « tradition » et sous un pseudo-alibi « culturel ».
La corrida ? Ni espagnole, ni portugaise. ABOLIE !
Luce Lapin
Photos : Jérôme Lescure, Alinéa 3, A. L. F., Animal Liberation Front. Dans la première photo, le flou artistique contraste avec le premier plan. Et nous prépare à la seconde photo.