Galgos et podencos : pendus ou adoptés
L’objectif du Club de reconnaissance et d’entraide aux lévriers est de mettre un terme au martyr de ces lévriers d’Espagne et, parallèlement, d’en proposer à l’adoption en France. Entretien avec son président, Jérôme Guillot, cofondateur du CREL.
Quand a été créé le CREL, et quels sont ses objectifs ?
L’association CREL a été créée le 29 juillet 2009 dans les Vosges par une poignée de bénévoles — quatre pour être exact. Le but de l’association est l’abolition des maltraitances infligées aux lévriers en Espagne, mais, sachant que ce problème récurrent ne se règlera pas en deux temps trois mouvements, nous menons en parallèle des actions pour améliorer leurs conditions de vie en Espagne. Très vite, nous avons pris conscience qu’il fallait « attaquer » le problème à la source et que seule une intervention au niveau du gouvernement espagnol porterait ses fruits. C’est pourquoi nous nous sommes rapprochés du Parlement européen et avons obtenu l’aide et l’appui de Michèle Striffler, députée européenne, marraine du CREL depuis 2011.
D’où viennent les chiens que vous proposez à l’adoption, et quels sont vos partenaires ?
Les lévriers que nous proposons à l’adoption viennent de la région de Castilla la Mancha, plus précisément d’Albacete, où se trouve Arca de Noé. C’est un refuge que nous avions rencontré à plusieurs reprises et qui nous avait semblé des plus sérieux, c’est pourquoi nous travaillons toujours avec lui. Nos partenaires en Espagne sont deux structures distinctes et de travail différent :
Arca de Noé est le refuge où nous apportons la majorité de nos aides matérielles, que ce soit par les placements et les adoptions des lévriers que nous sortons du refuge, par les soins apportés à ces derniers sous forme de nourriture, matériel médical ou paramédical, produits d’hygiène, etc., que nous leur faisons parvenir régulièrement. À noter que nous n’envoyons jamais d’argent, mais que tous les dons que nous recevons sont redistribués sous cette forme d’aide matérielle à notre refuge partenaire. Quant aux placements et adoptions, nous travaillons en étroite collaboration avec Arca de Noé qui nous fournit un maximum de renseignements, tant que faire se peut, quant au caractère et au comportement du lévrier proposé au placement. De notre côté, via nos délégués de région, nous visitons et peaufinons avec les familles candidates à l’adoption ou au placement leur projet d’accueillir un lévrier pour obtenir une harmonie parfaite entre le lévrier et sa famille, en tenant compte de la composition de cette dernière et de son mode de vie. De ce fait, nous n’avons que très peu d’échecs dans nos placements. Et nous nous engageons à « suivre » le lévrier placé et à lui venir en aide en cas de besoin. Le refuge s’engage également à nous fournir tous renseignements médicaux en sa possession sur les lévriers proposés à l’adoption et notamment les résultats des tests aux trois maladies méditerranéennes les plus courantes auxquelles sont exposés les lévriers en Espagne.
SOS GALGOS à Barcelone, association dont Anna Clements est la fondatrice, a bien sûr comme objectif le sauvetage des lévriers, mais plus particulièrement le travail de fond, le travail en partenariat avec les élus espagnols. C’est avec cette association espagnole que nous travaillons en étroite collaboration à un niveau parlementaire. Nos échanges sont des plus cordiaux et extrêmement importants, puisque la vision de la condition animale, d’un point de vue « politique » espagnol, est bien différente et éloignée de la vision française, ou du moins européenne, bien que l’Espagne soit un pays européen…
Combien de sauvetages effectuez-vous chaque année, de quelle façon, et sur quels critères choisissez-vous galgos et podencos qui viendront en France pour être adoptés ?
Nous réalisons entre deux et trois sauvetages par an, d’environ chacun six ou sept lévriers. Chaque lévrier qui monte est attendu par une famille d’accueil ou d’adoption. Aucun ne vient sans avoir un avenir assuré dès le moment où il arrive sur le territoire français. Nous ne choisissons pas ceux que nous proposons à l’adoption. Cristina et Sole, bénévoles et responsables du refuge Arca de Noé, nous proposent des lévriers en fonction de leur état de santé, de leur comportement et de leur urgence à les sortir du refuge. Nous savons très bien que certains sujets, plus soumis que d’autres, n’ont aucune chance de survie en refuge. Nous savons également qu’une faiblesse médicale, physique ou psychologique nécessite une attention plus particulière, quasiment impossible à prodiguer dans un refuge accueillant 450 chiens.
Que se passe-t-il lorsqu’ils arrivent, comment sont-ils répartis ?
Comme dit précédemment, chaque placement est pensé, travaillé, organisé entre le refuge espagnol et le CREL. Lorsque les lévriers, évidemment tous stérilisés, arrivent au siège social du CREL, les bénévoles de notre association ainsi que les familles sont déjà sur place. La prise en charge est rapide et efficace, chaque famille est en binôme avec un bénévole afin de recevoir les meilleurs conseils. Le vétérinaire de l’association est également présent et chaque lévrier, bien qu’en possession d’un certificat médical vétérinaire espagnol, obligatoire pour le transport, est examiné. Le véto vérifie son état à l’arrivée, la validité de ses vaccinations, les met à jour si besoin est, ainsi que l’identification, afin d’éviter toute erreur. Important : aucun de ces lévriers n’est porteur d’une des maladies méditerranéennes (tests négatifs). À partir de ce moment, la déclaration de l’animal sur le sol français est validée et transmise à l’administration compétente. Après la visite du vétérinaire, les lévriers sont nourris et ensuite s’impose une petite promenade pour dégourdir les pattes, puis chaque famille peut rejoindre son domicile avec son nouveau compagnon. Et, petite parenthèse — qui a son importance —, un moment convivial et de décompression, bien mérité et nécessaire, s’organise alors avec nos amis espagnols.
Comment s’est passé le dernier arrivage ?
Le dernier sauvetage a eu lieu samedi 27 septembre 2014. Comme habituellement, les bénévoles espagnols ont fait le voyage avec les chiens, dans l’objectif que le chien soit le moins stressé possible tout le long de ce transfert. En partant avec des personnes qu’ils voient au refuge quotidiennement, ils sont plus rassurés. Mais aussi, il est important pour les bénévoles espagnols de rencontrer les familles qui vont prendre le relais de la vie du chien, ainsi que pour la famille de pouvoir échanger avec ceux qui ont donné un nouveau départ à leur petit(e) protégé(e). Comme à chaque sauvetage, les « tests chats » ont été effectués. Tous l’ont passé avec succès — à savoir tout de même que nous conseillons une présentation minutieuse entre le lévrier et le chat de la maison, sachant que le comportement du lévrier en refuge diffère toujours un peu du comportement qu’il adoptera en famille, mais sachant également que le chat a son propre caractère et qu’il n’est pas toujours prêt à accueillir celui qu’il peut considérer comme un intrus dans un premier temps, mais avec lequel il pourra développer une complicité par la suite. Fin
Crédit photos : CREL, sauvetage du 27/09/2014. À la une : Jérôme Guillot portant un galgo qu’il vient de sortir du camion.
Autres photos, tout aussi émouvantes : les adoptants faisant connaissance avec celui/celle qu’ils ont attendu.
Un merveilleux souvenir ! J’étais ce 27 septembre à Corcieux, siège du CREL, à l’arrivée du camion qui amenait les lévriers. Ce fut un grand bonheur de les accueillir, de les voir heureux de sortir de leur cage de transport, après quelque 24 heures de voyage. J’ai assisté à toutes les opérations dont a parlé Jérôme Guillot dans cette interview. J’ai donc pu vérifier le très grand sérieux de cette association, et suis rentrée bien émue de mon passage dans les Vosges. Félicitations et admiration à toute l’équipe de bénévoles du CREL ! Et un grand merci particulier à Martine, sa précieuse trésorière, venue me chercher à la petite gare de Saint-Dié-des-Vosges. Je reviendrai avec joie…
Luce Lapin