Des députés obscurantistes
Ailleurs les peuples souffrent des religions, avec leurs guerres saintes et leurs sacrifices rituels d’animaux, mythes criminogènes, pour obscurcir les vies des humains. Ici nous avons les lobbies antinature pour maintenir une arriération calamiteuse.
Les 16 et 17 mars 2015, l’Assemblée nationale française examina en première lecture un projet de loi relatif à la biodiversité, grand et beau sujet essentiel. Une députée EELV, Laurence Abeille, et une députée socialiste, Geneviève Gaillard, avaient en commission introduit des amendements audacieux et de progrès dans le projet de loi, reconnaissant à l’animal sauvage un statut semblable à celui de l’animal domestique et condamnant les actes de cruauté l’affectant.
En janvier 2013, un sondage SOFRES révélait que 87 % des Français souhaitaient que l’animal sauvage bénéficie d’une protection légale à l’encontre des actes de maltraitance.
Le lobby chasse actionna ses relais au sein de l’Assemblée nationale, qui a rejeté, avec l’appui de la ministre de l’Écologie, Ségolène Royal, ces amendements conformes aux aspirations de l’immense majorité de nos contemporains. Les députés UMP furent, comme à leur habitude et selon la vocation de ce parti, les plus virulents, l’un d’entre eux, Philippe Meunier, déclarant avec une subtilité grasse « qu’avec sa voiture, il risquait de heurter une mouche et de violer ainsi la loi ». Mais le président des députés Front de Gauche, André Chassaigne, n’honora guère davantage son mandat, en s’opposant également à la reconnaissance du statut de l’animal sauvage. Quant à la ministre, au plus fort de sa « bravitude » et de sa « calamitude » de tueuse de loups, elle demandait le rejet des amendements animalistes pour ne pas braquer les chasseurs, qui, n’en doutons pas, sauront lui manifester leur ingratitude réactionnaire, au même titre que nous saurons « sortir les sortants » contre nature.
Ainsi, UMP et pseudo-socialistes, Parti radical de gauche et Front de Gauche se sont, une fois de plus, couchés devant le malfaisant lobby de la chasse française qui tire ce pays vers des positions rétrogrades, sans aucun fondement éthique. Car comment peut-on dissocier l’animal domestique et l’animal sauvage, au regard de leur sensibilité ? Pourquoi un loup, un renard, un blaireau seraient dépourvus de sensibilité, alors que chien, chat et cheval seraient des êtres sensibles ? En refusant que l’animal sauvage soit préservé des « actes de cruauté », le lobby chasse avoue implicitement que ses pratiques constituent des actes de cruauté. Depuis Darwin et son livre majeur, L’Origine des espèces, en 1859, il est acquis qu’entre l’animal et l’humain existe une différence de degré et non de nature. En conséquence, entre la chasse et le meurtre existe une différence de degré et non de nature. Certes, la chasse ne représente pas l’unique agression que des hommes non parfaitement hominisés infligent aux animaux. Nous ne pouvons qu’avec un vertige nauséeux songer aux milliards d’animaux élevés, détenus, tués, par cupidité, à travers le monde. Mais la spécificité de la chasse tient à ce qu’elle est un acte purement sadique, dans l’acception objective du terme. En effet, le chasseur occidental ne tue ni pour se nourrir, ni pour se protéger, ni pour s’enrichir. Ceux qui le qualifient de « viandard » lui reconnaissent une excuse qu’il n’a pas. Ce n’est point pour se procurer de la viande qu’il fusille et piège. Il tue uniquement pour jouir de la prérogative de donner la mort. Le sadisme est cette union abjecte du plaisir d’un individu avec la souffrance de sa victime. En cela, la chasse loisir est une faute absolue, la révélation d’une délinquance relationnelle à autrui.
Le projet de loi sur la biodiversité prévoit la création d’un « machin », une agence de la biodiversité, dont la composition, ne vous y trompez pas, exclura la plupart des vrais défenseurs de la biodiversité. Seuls seront admis les « gentils », ceux qu’agrée un pouvoir politique qui ne se soucie guère de la biodiversité. Néanmoins, les chasseurs ont exigé et donc obtenu que leur Office national de la chasse et de la faune sauvage soit exclu de cette agence de la biodiversité.
Ils tiennent à garder la mainmise, sans partage, sur les agents de l’Office et à rester entre eux.
Il faut dire que ce sont les premiers fossoyeurs de la biodiversité par leurs massacres et par l’artificialisation de la faune du fait des lâchers massifs d’animaux d’élevage.
Je tiens à remercier les parlementaires EELV, et en particulier Laurence Abeille, pour leur action en faveur du respect du vivant. Bien sûr, la situation politique ne permit pas le couronnement de leurs efforts. Le parti pseudo-socialiste capitula idéologiquement en se ralliant aux valeurs funestes de l’UMP. Ce parti nie les droits de la nature, car il sert les intérêts des promoteurs. L’UMP nie les droits de l’animal, car ce parti obéit docilement aux chasseurs et à la FNSEA. L’UMP nie les droits de l’humain, car ce parti flexibilise le salarié, casse le service public au profit du Marché.
Le 24 juin 1995, un député RPR, Pierre Lang, par ailleurs président de la Fédération des chasseurs de Moselle, pouvait, à la tribune de l’Assemblée nationale, lors de l’adoption d’une loi donnant des dates d’ouverture de la chasse contraire aux directives européennes, commettre ce lapsus révélateur :
« Les écologistes devront reconnaître que les chasseurs ont bien légiféré (rires sur les bancs, note le Journal officiel), non, je voulais dire les députés ont bien légiféré. »Vingt ans après cette forfaiture, le même esprit de mépris et d’ignorance affecte la représentation nationale qui nous offre le spectacle navrant d’un concours de « beaufreries » lorsqu’il s’agit du rapport au vivant et à la nature.
Français, vous méprisez vos hommes politiques. Comme vous avez raison. Alors changez-les !
Gérard Charollois
Convention Vie et Nature pour une écologie radicale