Saloperie de « tradition locale »!
Une ville qui ne figure pas dans ce que nous appelons les « villes de sang et d’agonie » et qui se trouve de plus dépourvue d’arènes peut-elle pour autant être exclue de la fameuse « tradition locale » (ininterrompue ou non, d’ailleurs, peu importe, ce n’est pas pris en considération par les tribunaux) ? Malheureusement, non, la zone géographique taurine « locale » délimitée par la loi étant très large.
Un arrêt de la cour d’appel de Toulouse du 3 avril 2000, confirmé par un arrêt de la cour de cassation du 7 février 2006, stipule : « Il ne saurait être contesté que dans le midi de la France, entre le pays d’Arles et le Pays basque, entre garrigue et Méditerranée, entre Pyrénées et Garonne, en Provence, en Languedoc, Catalogne, Gascogne, Landes et Pays basque existe une forte tradition taurine qui se manifeste par l’organisation de spectacles complets de corridas de manière régulière dans les grandes places bénéficiant de structures adaptées permanentes et de manière plus épisodique dans les petites places à l’occasion notamment des fêtes locales ou votives… »
Dans 12 départements, l’Aude (11), les Bouches-du-Rhône (13), le Gard (30), la Haute-Garonne (31), le Gers (32), la Gironde (33), l’Hérault (34), les Landes (40), les Hautes-Pyrénées (65), les Pyrénées-Atlantiques (64), les Pyrénées-Orientales (66), le Var (83), la corrida est l’« exception culturelle ». À noter que, si Élie Brun, ancien maire de Fréjus, a interdit la corrida dans le Var en 2010, ce qui fait tomber à 11 — 11 de trop ! — le nombre de départements dans lesquels elle sévit, celle-ci n’en reste malheureusement pas moins dans « la zone » permissive.
La barbarie tauromachique est rendue possible par l’alinéa 7 de l’article 521.1 du Code pénal. Mais il n’est pas cependant interdit de manifester contre ! Il faut d’autant plus y montrer notre opposition que, paradoxalement, il est possible, même en dehors de cette zone, de créer un club taurin ou toute autre activité liée à la tauromachie, qui confortent alors la notion de tradition, et d’en faire l’apologie.
Ne gaspillons pas notre temps, notre énergie et notre argent dans des procès, d’intention ou devant un tribunal, perdus d’avance, sur cette « tradition locale », utilisons plutôt des moyens efficaces afin d’obtenir la suppression de l’alinéa 7 de l’article 521.1 du Code pénal, ce très bon article qui punit de deux ans de prison et de 30 000 euros d’amende les sévices cruels infligés aux animaux. Débarrassons-le de ce pernicieux alinéa ! Plus que jamais, faites signer aux députés et aux sénateurs les propositions de loi en cours pour l’abolition : la suppression de l’alinéa 7 est politique !
Luce Lapin
Photo : campagne d’affichage 2015 du CRAC Europe pour la protection de l’enfance, initiée par Jean-Pierre Garrigues, président emblématique malheureusement décédé en novembre 2017. Depuis, aucun affichage n’a eu lieu.