Abattoirs : 5 enquêtes de L214, 5 mêmes horreurs

Abattoirs : 5 enquêtes de L214, 5 mêmes horreurs

Sévices dans les abattoirs : aux suivants !

Quand l’horreur est érigée au rang de routine. Après les terribles images des abattoirs d’Alès, puis celles du Vigan, et encore de Mauléon-Licharre, il paraissait aller de soi que des mesures draconiennes allaient enfin être prises par l’État français, responsable, en la personne de notre ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, Stéphane Le Foll, pour que « plus jamais ça ». Inspirez, ça va vous aider.

Mercredi 19 juin 2016, l’association L214 Éthique et Animaux a porté plainte pour maltraitance et actes de cruauté devant les tribunaux de grande instance de Béziers et de Nice contre les abattoirs de Pézenas (Hérault) et de Puget-Théniers (Alpes-Maritimes), objets de leurs quatrième et cinquième enquêtes (images tournées entre novembre 2015 et mai 2016), où sont abattus chevaux, moutons, bovins, cochons. Ces établissements avaient été récemment contrôlés… Pour Pézenas, le 17 mai dernier, par le député de l’Hérault Élie Aboud (LR), « dans le cadre de la Commission d’enquête parlementaire, lancée en avril dernier. Il n’avait alors relevé “aucun dysfonctionnement” dans l’abattoir ». « Quant aux images de l’abattoir du Mercantour, où les défauts de structure sont patents, elles ont été tournées après les audits mandatés par Stéphane Le Foll en avril 2016. »

Illustration : « À l’abattoir de Pézenas, les chevaux sont parfois tirés au treuil jusque dans le box d’abattage. Les dispositifs d’étourdissement étant inadaptés ou défaillants, les cochons reçoivent des chocs électriques avant d’être vraiment insensibilisés. L’abattage rituel des bovins et des moutons donne lieu à des images cauchemardesques ; la plupart des moutons sont suspendus encore conscients en cours de saignée ; un mouton reçoit un coup de couteau dans l’œil avant d’être égorgé ; les bovins sont saignés sans étourdissement, par cisaillement, et le sacrificateur revient découper dans la gorge des animaux conscients. À l’abattoir du Mercantour, les conditions d’abattages des bovins sont moyenâgeuses : la mentonnière du tonneau d’abattage est tenue par une ficelle, les employés doivent immobiliser la tête des veaux à l’aide d’une corde au moment de leur saignée. On voit un mouton s’enfuyant la gorge ouverte. Pour l’abattage rituel, là aussi, de nombreux moutons sont suspendus conscients en cours de saignée. » Des caméras dans tous les abattoirs et leur accès aux associations de protection animale sont de nouveau demandés à M. Le Foll.

Une fois de plus, où étaient les vétérinaires censés veiller sur le — gros guillemets — « bien-être animal » ? N’en doutons pas, chaque nouvelle enquête révélera les mêmes scènes, épouvantables, révoltantes — douloureuses pour qui éprouve compassion et empathie. Et un même constat, au fil des vidéos révélées par l’association. Donner la mort à des animaux qui veulent juste vivre leur vie d’individu, ce qui est leur droit, ou du moins qui devrait l’être, est un acte violent, d’une grande brutalité. « Il n’y a pas de mort douce » pour les plus de 3 millions de mammifères et d’oiseaux abattus chaque jour en France — soit plus de 1 milliard par an —, comme l’expriment régulièrement Brigitte Gothière et Sébastien Arsac, cofondateurs et porte-parole de L214. Dans ces abattoirs dénoncés, pas de différence entre l’abattage avec ou sans étourdissement, puisque sont pratiqués l’abattage « classique » et le rituel. Comme on le voit, « l’abattage rituel n’a pas le monopole de la cruauté », souligne Brigitte.

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L214 a proposé, entre autres, à la commission d’enquête parlementaire « les alternatives au minimum végétariennes, au mieux vegan dans la restauration collective »En attendant un changement légitime de société (et on se dépêche, on se dépêche !), un système de vidéosurveillance s’impose de façon urgente dans TOUS les abattoirs. Xavier Beulin, président de la FNEA, Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles, est contre ! On parie qu’on ne l’obtiendra pas ? En attendant, malheureusement, on vous dit à la prochaine enquête, chers L214…
 Vidéo

• Les trois premières enquêtes de L214 ci-dessous.

Alès
Saignée générale !

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Chevaux, moutons, veaux, vaches, taureaux, cochons furent victimes de cruauté dans cet abattoir du Gard.

Après les terribles images dévoilées par la vidéo de L214 Éthique et Animaux le 14 octobre 2015, où les bêtes, pas correctement étourdies, ont repris conscience sur la chaîne d’abattage, le parquet d’Alès a ouvert une enquête. Cette situation a par ailleurs généré des risques sanitaires. Pour L214, « la commune d’Alès, en tant qu’exploitant de l’abattoir régional, porte la responsabilité des pratiques qui s’y déroulent quotidiennement, et déplore que seul un scandale médiatique soit de nature à inciter les autorités à agir ». D’autre part, « la réglementation exige la présence d’un vétérinaire au sein de chaque abattoir et lui confère la responsabilité d’intervenir immédiatement en cas de manquements : que font les représentants de l’État en place au sein de l’abattoir ? ».

L’été dernier, la visite de l’abattoir avait été refusée à l’OABA, Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoirs. Son président, le vétérinaire Jean-Pierre Kieffer : « Le ministre de l’Agriculture nous promet pour la période 2015-2020 une stratégie de la France pour le bien-être des animaux. Il est urgent qu’elle débute par un contrôle renforcé de tous nos abattoirs. »

L’abattoir a été rénové par la Ville il y a cinq ans pour 2,5 millions d’euros, mais on a visiblement oublié de donner un coup de neuf sur le mur de la compassion… Quoi qu’il en soit, et quel que soit le lieu et le mode d’abattage, c’est toujours l’horreur pour les animaux dits « de ferme ». Combien de souffrances passées et combien encore à venir ?

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Brigitte Gothière, cofondatrice et porte-parole de L214 : « Le maire, Max Roustan [Les Républicains], qui laisse pourtant des corridas se dérouler dans sa ville, a été ému par les images terribles de mise à mort des animaux dans l’abattoir d’Alès et a ordonné sa fermeture immédiate à titre conservatoire quelques heures seulement après que nous avons révélé les vidéos. Ces images sont en effet extrêmement choquantes, comme toutes celles qui sortent d’un abattoir. Sauf qu’on a très rarement accès à ces lieux, généralement, c’est la boîte noire, on ne sait pas. Ici, la panique, la terreur, la douleur des animaux sont montrées, évidentes, décuplées par le non-respect de la réglementation. Beaucoup de personnes ne supportent pas de voir la vidéo : c’est bien la preuve qu’on est vraiment mal à l’aise avec ce qu’on fait subir aux animaux. S’il faut retenir une chose de ces images, c’est bien l’horreur qu’elles véhiculent et le “message ” des animaux : ils résistent, ils ne veulent pas mourir, ils souffrent intensément, ils agonisent violemment dans ces lieux de mort. Une touche d’espoir : chacun de nous a le pouvoir de changer leur sort. Nous pouvons arrêter le carnage. On n’a pas besoin de manger des animaux — et autres “produits” comme le lait, les œufs et les poissons — pour être en bonne santé, se régaler, vivre pleinement. Il ne tient qu’à nous d’en finir avec l’ère des abattoirs et de construire ensemble un monde vegan, où chaque être sentient (sensible) peut vivre. »

Brigitte

                                                        Brigitte Gothière

L214 a porté plainte pour « mauvais traitements et violation de la réglementation » contre l’abattoir, qui, vous n’allez pas le croire, a lui-même porté plainte contre… L214 (mais si).

Le « plaisir » de les manger ? Le courage de regarder… Vidéo pétition

Le Vigan
Bio ou pas, souffrance certifiée

2016-02-abattoir-vigan-900Quatre mois après le scandale qu’a suscité l’abattoir d’Alès, dans le Gard, l’association L214 Éthique et Animaux a diffusé mardi 23 février 2016 une vidéo de quatre minutes trente dévoilant des scènes épouvantables de cruauté, tournées en caméra cachée dans l’abattoir intercommunal du Vigan (Gard).

Ces images ont été filmées, pendant une dizaine de jours, au hasard, entre mai 2015 et février 2016. Les animaux y sont manipulés avec cruauté. Communiqué de L214 : « Moutons violemment projetés contre des barrières, employé s’amusant à leur infliger des décharges électriques, animaux mal étourdis et conscients sur la chaîne d’abattage, matériel défaillant, vétérinaires absents (?) : des scènes intolérables violant la réglementation et causant d’importantes souffrances aux animaux. […] À l’abattoir du Vigan, l’incompétence est doublée de sadisme chez certains. On voit sur la vidéo un opérateur jetant violemment des moutons apeurés, sans parvenir à les faire avancer. Dans une autre séquence, l’employé s’amuse à infliger des décharges électriques à la tête des animaux, sous les rires de son collègue. »

Une plainte est déposée par l’association au parquet d’Alès, l’abattoir fermé quatre heures après la diffusion de la vidéo. Le Vigan va-t-il ensuite rouvrir tranquillement, tout comme celui d’Alès, qui avait refusé à L214 une simple visite ? Les paris sont ouverts, selon la formule consacrée. Rions un peu – attention, humour noir : j’apprends, par Sébastien Arsac, cofondateur et porte-parole de L214, qu’après la fermeture de l’abattoir d’Alès les animaux étaient tués au Vigan… Donc en plein dans la période où a été tournée la vidéo.

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Il n’y a pas d’abattoirs spécifiquement réservés au bio. Les futurs suppliciés de la filière bio sont juste séparés et occupent des cases distinctes, afin que le bio ne soit pas « pollué » par les animaux venant du circuit traditionnel – les bio sont (normalement) abattus en premier. Le Vigan produit 300 tonnes de cadavres d’animaux (appelés « viande ») par an, dont 15 tonnes de bio, avec l’appellation « certifié bio » par Ecocert, qui s’assure que les règles de cette production sont respectées. « En pratique, je ne suis pas sûr que le contrôleur Ecocert soit présent pour contrôler. C’est également cet organisme qui certifie le label bio halal », me rappelle Frédéric Freund, directeur de l’OABA, Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoirs. Rassurant… Dans l’opinion publique, le bio peut apparaître comme l’assurance d’un meilleur traitement réservé aux animaux, jusque dans la façon de donner la mort. Il n’en est rien, et j’ai envie de dire heureusement – façon de parler, bien sûr –, tous les animaux devant être traités de la même façon toute leur vie durant.

Chaque jour, en France, plus de 3 millions de mammifères et d’oiseaux « de boucherie » sont abattus, soit plus de 1 milliard par an. L’élevage est responsable de 14,5 % des émissions de gaz à effet de serre (FAO, Food and Agriculture Organization of the United Nations, 2013). Doit-on, peut-on encore manger de la viande ? Pour la planète, pour le respect dû aux animaux – qui, tout comme nous, ont le droit de vivre –, pour la santé ? « Un débat philosophique qu’on ne peut pas aujourd’hui se dispenser d’avoir » (Sébastien Arsac, cofondateur et porte-parole de L214, sur BFMTV, 23 février 2016).

Mauléon-Licharre
Ça suffit plus de pleurnicher

Mises à mort d’agneaux de lait — frappés à coups de crochet —, de veaux, de chevreaux et de bovins adultes dans un abattoir certifié bio, Label rouge et IGP (indice géographique protégé).

L’histoire se répète, on prend les mêmes et on recommence ? Ah, non, on en prend d’autres et on continue, puisque, après Alès et le Vigan, c’est au tour de l’abattoir intercommunal de Mauléon-Licharre (Pyrénées-Atlantiques) d’être accusé de cruauté dans une vidéo révélée par — encore eux ! — une enquête de la formidable L214. « Scènes de souffrance animale sévère, infractions aux règles de protection animale, graves manquements et violences du personnel. » Et l’horreur va crescendo, comme si c’était possible : pris entre deux crochets, sans aucun employé ni personnel des services vétérinaires pour venir à son secours, sans surveillance aucune de la chaîne d’abattage, un agneau, non étourdi, est écartelé en toute conscience. Scènes d’agonies, cadences infernales, dictées par les consommateurs, qui exigent l’abattage de 15 000 agneaux pour les fêtes pascales — en tout, en France, quelque 115 000 seront sacrifiés, au nom de la sacro-sainte tradition et religion : bouffer son gigot à Pâques…  L’abattoir est-il le seul responsable ?Mauléon-LicharreDes scènes épouvantables de cruauté, un directeur complètement à l’ouest, pas au courant. Tiens donc, il n’est pas payé pour savoir ce qui se passe dans son abattoir ?

« Des représentants de la protection animale dans tous les abattoirs », a promis, le 31 mars, Stéphane Le Foll, notre si sensible ministre de l’Agriculture. Mais ne serait-ce pas ce qu’on nomme un « effet d’annonce » ? Brigitte Gothière, cofondatrice et porte-parole de L214 : « Et même un gros effet d’annonce, puisque M. Le Foll nous déclare qu’il va enfin faire respecter le règlement n° 1099/2009 (applicable depuis le 1er janvier 2013). Sa démarche est-elle sincère ? C’est en effet une obligation légale d’avoir un responsable de la protection des animaux dans les abattoirs. En même temps, cela peut sembler bizarre de “protéger” ceux que l’on va tuer… C’est surtout rassurant pour le consommateur de savoir qu’il y a quelqu’un qui protège les animaux dans ces lieux de mort, il va penser que le ministère a la situation bien en main, alors que, une nouvelle fois, l’objectif du ministre est de ne pas faire baisser la consommation de viande. L’idée est plutôt d’amener une réflexion plus profonde sur la consommation de notre société, et pas seulement  de mettre des bouts de sparadrap sur les hectolitres de sang qui s’écoulent des gorges des animaux. »

On sait depuis un paquet d’années qu’on peut vivre en bonne santé sans manger d’animaux, êtres sensibles transformés en cadavres appelés « viande » — quelle hypocrisie —, et qu’à l’abattoir il n’y a pas de label qui tienne : tous sont égaux dans la souffrance. Chaque jour, en France, plus de 3 millions de mammifères et d’oiseaux dits « de boucherie » sont abattus pour la consommation, soit plus de 1 milliard par an.

Luce Lapin

Photos L214