Chiens de vigiles, chiens de misère
C’est le chômage, la pauvreté, qui ont produit ce métier : n’importe qui peut s’improviser agent de sécurité.
Certaines sociétés de gardiennage imposent de posséder un chien pour être employé. Les vigiles n’ayant pas le droit d’être armés, le chien fera office de revolver. Outil de travail, traité comme tel, et non comme un être sensible, il est beauceron, berger allemand, doberman, voire croisé — grand et noir, il impressionne. Attribut obligatoire : la muselière. Engagé ! Autrement dit, c’est le chien qui obtient le poste. L’uniforme fait le reste.
Sous-alimenté, parce que, la bouffe, ça coûte cher, le chien de vigile est également souvent privé d’eau — parce que, quand on boit, on pisse. Ces chiens sont régulièrement battus, sous prétexte de les endurcir et de se faire respecter. Jamais de caresses — car, comme dans les labos, on ne prodigue pas d’affection à « du matériel ». Je viens de vous décrire la généralité. Je crains en fait de n’être en dessous de la réalité.
Quand les chiens ne « servent » pas, ils sont le plus souvent enfermés à la cave, dans une cage de transport, ou dans le coffre d’une voiture. Ils peuvent devenir excessivement dangereux, et pour cause. Les vigiles expliquent qu’eux aussi sont maltraités par leurs employeurs et non considérés. Et sous-payés. S’ils perdent leur travail, ils abandonnent le chien — qu’en feraient-ils ? —, qui devient bouche, ou plutôt gueule à nourrir inutile. Idem, pas de retraite, pas de « reconnaissance » envers ce compagnon malgré lui. Abandon au profit d’un plus jeune, adopté, c’est moins cher — prudence, les refuges !
Ces sociétés de gardiennage ne sont pas des tendres. Ni envers les humains, ni envers les animaux. Normal…
Article 521.1 du Code pénal, alinéa 1 : « Le fait, publiquement ou non, d’exercer des sévices graves, ou de nature sexuelle, ou de commettre un acte de cruauté envers un animal domestique ou apprivoisé, ou tenu en captivité, est puni de 2 ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. »
Luce Lapin