Veaux, vaches, cochons… saumons

Il est courant de dénoncer, à juste titre, les élevages intensifs d’animaux de ferme, synonymes d’exploitation, et d’en demander la suppression au profit des biologiques, bien moins nombreux, mais plus exigeants sur le bien-être animal, car soumis à une charte très stricte.

Petite parenthèse : à l’abattoir, pas de différence de traitement. On se préoccupe moins du sort des poissons, qui attendrissent peu, voire pas du tout, probablement parce qu’il n’y a pas d’échange possible sur le plan affectif, pas de caresses, pas de câlins… Dépourvus de cordes vocales, ils ne crient pas, donc ne nous interpellent pas – ils ne suscitent de fait pas d’émotion de notre part. Néanmoins, ce sont des êtres sensibles, qui éprouvent également de la joie, ressentent la peur et la souffrance.

Eux aussi sont élevés pour notre consommation. En ce qui concerne les saumons, le chiffre est énorme : 98 % dans des élevages, certes intensifs, mais à « dimension normale » – si je puis dire. Car des multinationales ont trouvé mieux pour un profit encore plus grand. Notre imagination est sans limite lorsqu’il s’agit de gagner plus, surtout sur le dos des animaux…

Démonstration. Le Pas-de-Calais, les Côtes-d’Armor et la Gironde sont l’objet d’une étude qui permettrait l’implantation de gigantesques fermes-usines de saumons. Même pas en mer, mais à terre, entassés par millions dans de tout petits bassins. « On peut avoir jusqu’à 500 saumons par mètre cube d’eau. C’est quand même énorme pour des animaux qui en principe sont solitaires », indique Esther Dufaure, directrice de Seastemik, une ONG de préservation de l’océan, à L214 Éthique & Animaux, qui a révélé cette enquête, le 10 octobre dernier. Effarante également est la consommation d’électricité annuelle que générerait une seule de ces usines : la même que celle d’une ville de 40 000 habitants.

Pour L214, on n’est même plus dans l’intensif, mais dans l’ultra-intensif, sur ce qui entraînerait « une aberration écologique et sanitaire […] : rejets toxiques, concentration en métaux lourds, surpêche et pillage des ressources à l’autre bout du monde pour nourrir ces saumons… ».

« La face cachée du saumon. Pourquoi le saumon d’élevage n’est pas aussi rose qu’il paraît », à voir sur youtube.com/watch?v=YZIFoLoTZO0 et aussi, à lire : seastemik.org/publications
Luce Lapin