Végétarisme, le bilan de l’AVF
AV, Alliance végétarienne, créée en décembre 1994, s’est inspirée de la très importante VSUK, Vegetarian Society of the United Kingdom, dont elle est membre. En 2008, sous la présidence d’André Méry (2001-2011), AV devient AVF, Association végétarienne de France. Elle compte aujourd’hui plus de 2 600 membres. Le végétarisme, à base de protéines végétales, exclut la consommation de chair animale (viande, poisson, crustacés). Le végétalisme va plus loin et y ajoute les œufs, le lait et tout ce qui en contient (fromage, yaourts…). Quant au véganisme, il bannit tout produit animal et ses dérivés (cuir, fourrure, laine, soie, miel…). Extrémisme ou extrême cohérence ?
Nous traiterons ici, avec Isabelle Dantzer, militante de longue date, et présidente de l’AVF depuis mars 2012, du végétarisme et de son évolution en France.
En 1994, il n’existait pas d’organisations végétariennes dans notre pays. Quel est le point de départ de création de l’AV, et comment a-t-elle procédé afin de promouvoir le végétarisme ?
L’association naquit de la volonté d’un groupe de militants de voir le végétarisme démarrer sérieusement en France, après des décennies d’incertitudes. Elle développa rapidement des ambitions nationales, installa un réseau de délégués dans les régions françaises, se fit connaître par de nombreux communiqués de presse et lança dès 1998 l’initiative des Journées Mondiales Végétariennes. Les JMV sont aujourd’hui toujours organisées sous l’égide de l’AVF. Malgré les difficultés à promouvoir le végétarisme en France, les actions, les efforts et le sérieux de l’AVF lui ont permis de devenir une organisation reconnue, et l’on ne compte plus les émissions de radio ou de télévision auxquelles elle a été invitée. L’association compte plus de 2 600 membres, ce qui en fait de loin la plus grosse organisation végétarienne ayant jamais existé en France. Au niveau international, l’AVF a noué des contacts avec de nombreuses organisations végétariennes européennes. Elle est bien sûr, depuis le début, membre de l’EVU (European Vegetarian Union). Récemment, l’AVF a reçu une importante bourse de l’Union européenne, afin de participer au programme « Grundtvig » de formation des adultes dans le domaine de l’alimentation.
L’AVF fait la promotion du végétarisme autour de trois thèmes : éthique, santé et environnement. Elle est non-confessionnelle et non-politique. En France, les réticences au végétarisme sont nombreuses ; la campagne des « lundis végétariens » a été conçue pour faire découvrir en douceur l’option végétarienne ; plus un grand nombre de personnalités connues soutiendront cette campagne et plus le succès sera au rendez-vous.
Être végétarien à l’école, est-ce possible ?
Depuis le 30 septembre 2011, un décret oblige que des protéines animales soient présentes à tous les repas. De nombreux parents cachent leur végétarisme pour ne pas avoir d’ennuis (ils font manger leurs enfants chez eux, chez une nourrice, etc.). Nous avons des témoignages de parents qui n’ont pas le droit de fournir un repas végé à leur enfant sous prétexte de « risque de contamination »… Les mairies sont en fait toutes-puissantes pour décider au cas par cas de laisser un enfant apporter son repas végétarien à l’école. D’autres mairies fournissent un repas végé pour l’enfant, d’autres encore en mettent en place un quotidien (souvent pour des raisons religieuses : halal et casher). À Agen, la mairie a décidé de fournir tous les jours un repas sans viande (mais avec poisson). Une équipe de bénévoles, aidée d’avocats bénévoles, travaille sur le sujet du décret. André Méry, qui représente l’AVF, a fait un point très complet sur la situation dans la revue Alternatives végétariennes n° 108.
Combien y a-t-il de végétariens en France ?
Il est très difficile de le savoir de façon précise, car il n’y a pas d’étude officielle à ce sujet. On en estime le nombre entre 1 et 2 millions. Et l’association ne cesse de grandir, grâce à l’engagement sur le terrain de tous ses bénévoles : présence sur de nombreux stands dans des manifestations bio (foires, salons, festivals…), organisation de conférences, projection de films, cours de cuisine végétarienne, sorties conviviales (restaurants, pique-nique, randonnées), participation à des manifestations sportives, etc. L’idée est de banaliser le végétarisme en montrant au quotidien que l’on peut être végétarien et mener une vie sociale normale.
Cette politique porte ses fruits, les végétariens sont de plus en plus visibles auprès du grand public qui est demandeur de conseils et dans les médias qui se font le relais de la prise de conscience de l’impact désastreux de l’élevage sur l’environnement.
Par ailleurs, AVF développe sa communication via sa revue trimestrielle Alternatives végétariennes, le site Internet (environ 26 000 visites mensuelles), la page Facebook (700 personnes en décembre 2010, 6 000 en septembre 2012), la newsletter « Le p’tit veg » (plus de 5 000 destinataires), le forum et toute la documentation AVF (guide du végétarien débutant, tableau nutritionnel, fiches santé, etc.). Ainsi, le nombre d’adhérents est passé de 500 en 2003 à plus de 2 600 en 2012, soit cinq fois plus en moins de dix ans.
Comment s’alimentent les végétariens au quotidien ?
On trouve de plus en plus de produits alimentaires dans les épiceries (produits à base de soja, de seitan, « steak » de soja, légumineuses en tout genre), des substituts carnés, etc. Les librairies proposent de plus en plus de livre de cuisine végétarienne. De plus en plus de restaurants végétariens ouvrent en France, même si le nombre reste limité par rapport aux autres pays d’Europe. À Paris, il existe un guide des restaurants végétariens : Paris végétarien, les meilleurs restos, d’Alcyone Wemaëre.
Être végétarien n’est plus un frein à la vie sociale, même si cela reste difficile en province hors les grandes agglomérations.
De quelle façon le végétarisme se développe-t-il aujourd’hui ?
Il est indéniable que le végétarisme a beaucoup progressé depuis vingt ans en France. Difficile de savoir si le nombre de végétariens a augmenté, mais, ce qui est certain, c’est qu’être végétarien n’est plus une honte ou une tare. Les végétariens sortent du bois… En témoignent les innombrables blogs de cuisine végétarienne sur Internet, par exemple ! Cette évolution très favorable du végétarisme en France est liée au développement d’Internet. Ce moyen de communication a permis aux végétariens de se regrouper, de se sentir moins seuls et de commencer à organiser des actions de promotion du végétarisme. C’est grâce à la Toile qu’AVF peut communiquer rapidement et facilement avec la communauté végétarienne et sympathisante. À cet égard, le développement exponentiel d’« amis » sur notre page Facebook montre l’intérêt réel et grandissant du public pour le sujet. Nous ne pouvons que nous en féliciter pour les animaux…
Propos recueillis par Luce Lapin