Abattage « humanitaire », 1964 : au commencement était la loi

Abattage « humanitaire », 1964 : au commencement était la loi

En ce temps-là, on ne parlait pas de « people ». Aujourd’hui, on n’aurait pas manqué de souligner qu’Édith Piaf était signataire d’une pétition demandant un abattage « humanitaire », et qui obtint 150 000 signatures.

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En effet, jusqu’en 1964, les animaux de boucherie n’étaient pas étourdis avant la mise à mort. C’est Jacqueline Gilardoni, fondatrice en 1961 de l’Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoirs (OABA), qui est à l’origine de ladite pétition, laquelle a débouché sur le décret du 16 avril 1964, instaurant l’obligation d’étourdir. Et encore, pas pour tous les animaux. Ce n’est que six ans plus tard que cette obligation s’imposera également pour les volailles et les lapins. Malheureusement, dès l’origine, la loi prévoyait déjà la possibilité de ne pas étourdir en cas d’abattage rituel (casher et halal), c’est-à-dire de permettre que soit pratiqué l’égorgement en pleine conscience, donc en pleine souffrance.

Madame Gilardoni, décédée en 2001, a présidé l’OABA durant quarante ans. Elle a souhaité que ce soit Jean-Pierre Kieffer qui lui succède.

Depuis maintenant plusieurs années, des enquêtes de l’OABA ont révélé que la viande issue de l’abattage religieux passait couramment dans le circuit traditionnel. Pour « circonscrire l’abattage sans étourdissement », Nicolas About, président du groupe Union centriste au Sénat, avait déposé en 2010 une proposition de loi pour que la dérogation à l’étourdissement ne devienne pas une généralité. Cette proposition insistait notamment sur l’étiquetage. À quoi servirait-il? « La moindre des choses est d’informer le consommateur sur l’origine de la viande qu’il achète, et notamment sur le mode d’abattage des animaux (avec ou sans étourdissement). Or, actuellement, le consommateur achète sans le savoir et surtout sans le vouloir de la viande susceptible de provenir d’un animal égorgé selon un rite musulman ou israélite où l’animal a agonisé pendant plusieurs minutes… L’étiquetage permettra au consommateur de pouvoir exercer sa liberté de conscience », avait expliqué Frédéric Freund, actuel directeur de l’OABA. Cet étiquetage du mode d’abattage a été voté par le Parlement européen le 16 juin dernier 2010 : « L’abattage sans étourdissement (comme l’exigent les traditions religieuses musulmanes ou israélites) devra également être signalé [amendement n° 205, adopté à une très large majorité]. »

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Brice Hortefeux, alors ministre de l’Intérieur de la droite dure du président Nicolas Sarkozy, très respectueux de la démocratie, comme vous allez le constater, avait alors déclaré, le 6 septembre 2010, à la synagogue de la Victoire, à Paris : « Vous pouvez compter sur ma mobilisation et celle des députés français au Parlement européen pour que le projet n’aboutisse pas. » Aujourd’hui, plus de quatre ans plus tard, la gauche « généreuse et progressiste », ainsi que l’appelait Cavanna de ses vœux, est au pouvoir depuis mai 2012 — bientôt trois ans. Un étiquetage est effectivement présent depuis peu. Mais il concerne… les différents morceaux de viande. Sur ces étiquettes, toujours pas la moindre mention sur les méthodes d’abattage, classique ou rituel, comme le demandent, depuis maintenant des années, les associations de protection animale, et notamment l’OABA , qui donne ces chiffres : l’abattage rituel (casher et halal) concerne 62 % des ovins au minimum et 28 % des bovins, dont 43 % des veaux — égorgés en toute conscience.

L’objectif est l’étourdissement pour TOUS les animaux dits « de boucherie » ! Et, mieux encore, de ne plus manger d’animaux (végétarisme) ni de produits dérivant d’animaux (végétalisme) — et d’être en bonne santé, c’est possible!

Quant à ceux qui raillent les végétariens en leur opposant le fameux « cri de la carotte », je rassure leur profonde sensibilité envers la Daucus carota : elle ne sent, elle, vraiment rien quand le couteau tranche ses fanes.
Luce Lapin

 

Photos OABA