« … et le singe devint con »
Ce 22 février, François Cavanna, décédé le 29 janvier 2014, aurait eu 100 ans. Tout comme il haïssait les guerres, Cavanna éprouvait un même dégoût, viscéral, pour la corrida, la chasse, la vivisection. Il le gueulait, c’est le bon mot, dans ses écrits, et lorsqu’il était invité sur les plateaux télé. Il a sans aucun doute ouvert la voie aux combats menés aujourd’hui par la protection animale, et pourtant rares sont ceux qui en sont conscients… et reconnaissants.
Un extrait tiré de … et le singe devint con (Belfond, 1984), premier tome de L’Aurore de l’Humanité1, montre combien l’Homme « supérieur » entend dominer les espèces animales, symbolisées ici par le cheval :
« Cinquième leçon. L’homme et l’animal signent un pacte d’amitié »
« La première fois que l’Homme vit un Cheval, il lui flanqua un coup de pied dans le ventre. Le Cheval n’avait jamais vu d’Homme, mais il avait déjà eu mal au ventre. Il ne fit pas le rapprochement entre la douleur et le coup de pied. Il était bon et ne pouvait imaginer tant de méchanceté. Il se dit simplement : “Quelle coïncidence amusante ! Juste au moment où ce type me lance gentiment sa patte de derrière dans le ventre pour me dire bonjour, voilà le mal de ventre qui me prend ! Ça, alors, on me la copiera ! […]” L’Homme fraternisa par la suite avec beaucoup d’autres espèces : Bœuf, Âne, Cochon, Éléphant, Chameau, Mouton, Chèvre, Lama, Poule… […] »
« Toro ! Toro ! »
Ce texte sur la corrida, pour faire honte aux politiques qui s’obstinent toujours à évoquer la tradition, l’art, la culture, méprisant ainsi la grande majorité des Français qui souhaitent l’abolition de cette barbarie érigée en « spectacle ».
Dans Coups de sang (Belfond, 1991), chapitre « Les assassins tranquilles », Vous qui aimez…, un écrit peu connu :
« Vous qui aimez la mort, vous qui vous repaissez du spectacle de la mort “esthète”, je vous hais. Le sang vous dégouline des babines, vous êtes hideux et con. Je vous hais.
Je rêve d’être au beau milieu d’une de vos arènes, à plat ventre derrière une mitrailleuse lourde, et de crever bien à l’aise vos paillasses pleines de merde et de fantasmes cradingues, de faire gicler la pourriture et la tripaille… Et puis je me secoue, je me rappelle que je ne sais même sur quel machin il faut appuyer pour faire cracher une mitrailleuse, et je me dis que vous rigoleriez vos rires dégueulasses de me voir là, à plat ventre comme un con, et me jetteriez vos épluchures de cacahouètes, et qu’on me traînerait par les pieds, la gueule dans le sable, et que vous gueuleriez impatiemment “Toro ! Toro !”… Et bon, vous avez gagné. Les cons gagnent toujours. Ils sont trop. »
Sur la langue française : Mignonne, allons voir si la rose… (Belfond, 1989, Albin Michel, 2001).
Lisez, et faites lire Cavanna !
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