L’« indulto » : juste de l’enfumage!
Le 1er août 2010, sans aucun doute en réaction à l’annonce de l’abolition en Catalogne espagnole, sursaut pathétique, et qui se veut symbolique: un jeune torero a gracié un taureau à Barcelone, dans les arènes La Monumental. Ne nous laissons pas abuser par cette prétendue « grâce », qui n’est que tromperie.
Cette mascarade trahit une profonde panique des taurins de voir disparaître prochainement leur passion morbide. Le mundillo, le petit monde de la tauromachie, tente ainsi de prouver qu’il est capable de «compassion». Mais qu’en est-il exactement du taureau? Contrairement à la légende, largement entretenue par le milieu, selon laquelle le taureau gracié retourne dans son élevage et vit heureux sa vie de reproducteur — «il saute les vaches», comme il est dit élégamment —, la réalité est tout autre et bien dissimulée. Les banderilles une fois arrachées, et ce, sans anesthésie, il peut effectivement retrouver sa prairie. Ce fut le cas de Cara Alegre, gracié le 15 août 2005 par son matador, «grâce» hypocrite et obscène, accordée pour attendrir dans les chaumières — allons, les toreros ne sont pas si cruels, la preuve.
C’est effectivement facile de jouer les grands seigneurs envers des taureaux tellement amochés qu’ils n’ont aucune chance de se remettre de leurs blessures, qui, contrairement à ce qu’affirme Simon Casas, directeur des arènes de Nîmes, ne sont pas «à l’échelle d’une entaille dans le corps humain». Cara Alegre avait d’ailleurs succombé à celles infligées par la pique du cavalier. Il a donc agonisé durant quinze jours… A-t-il seulement reçu des soins? Apparemment, non. Ils l’ont collé dans un pré, et débrouille-toi. Visiblement, il n’a pas su. Et surtout pas pu… Les rares (et valeureux, on dit…) taureaux graciés l’ont été selon des critères imbéciles définis par le mundillo. Ils ont dû faire preuve de «courage», de «bravoure» — valeurs répondant évidemment à des considérations opposées à notre humaine méprisable «lâcheté». Ils ne survivent de toute façon pas aux tortures à l’arme blanche qu’ils ont subies dans l’arène. L’abolition demeure plus que jamais la seule et vraie « grâce » possible.
Luce Lapin