1) Un amendement « pour faire joli ». 2) Êtres sensibles : l’arnaque. 3) Non-événement.

 1. Un amendement « pour faire joli »

Les animaux domestiques pourraient être, de par l’amendement n° 59 déposé le 15  avril par les députés PS Colette Capdevielle, Jean Glavany (tous deux aficionados, je le mentionne mine de rien, en passant…) et Cécile Untermaier, considérés comme des « êtres doués de sensibilité » dans le Code civil — alors qu’ils ne le sont jusqu’à présent que dans les Codes rural et pénal.

Ça changerait quoi, pour eux ? Rien. Absolument rien. Pour preuve, les nombreux sous-amendements (source : l’excellent site de L214, politique et animaux) présentés par le Groupe écologiste et par Laurence Abeille (députée EELV du Val-de-Marne) ont tous été rejetés. Des exemples? Attention, il va vous en pleuvoir :
Sous-amendement 73 pour la bien-traitance, présenté par le Groupe écologiste — EELV, ND, UDB (Europe Écologie-Les Verts, Nouvelle Donne, Union démocratique bretonne) —, composé de 17 politiciens :
REJETÉ!
— Sous-amendement 79 pour l’abolition des corridas et des combats de coqs, présenté par Laurence Abeille :
REJETÉ!
— Sous-amendement 75 pour le respect des impératifs biologiques des animaux, présenté par le Groupe écologiste :
REJETÉ!
— Sous-amendement 74 pour le respect des impératifs biologiques des animaux, présenté par le Groupe écologiste :
RETIRÉ! Carrément, avant discussion, avec l’amendement 24 auquel il se rapportait.
Sous-amendement 72 pour la bientraitance, présenté par le Groupe écologiste :
RETIRÉ! Idem sous-amendement 74.

Comme on le constate, le Groupe écologiste a persévéré dans la présentation de ses sous-amendements, espérant sans doute qu’au moins un « passerait », mais en vain… Car cet amendement n° 59, c’est « juste une harmonisation, un symbole », comme l’a expliqué sans équivoque, sans nous laisser le moindre doute et, de fait, pas plus le moindre espoir, Jean Glavany au « Téléphone sonne » de France Inter lundi de Pâques. Ils deviennent « sensibles », c’est-à-dire que l’amendement s’aligne sur le Code pénal et le rural. Ça fait plus propre. Un petit mieux sur le plan juridique, quand même ? « Il [l’amendement] ne change rien au droit actuel. » Quant au texte, bien plus prometteur, que prépare Geneviève Gaillard depuis un an et demi, notre ex-ministre de l’Agriculture a-t-il voulu le court-circuiter ? Ce n’était pas pour contrer la députée PS des Deux-Sèvres, assure-t-il, mais il craint qu’un tel projet, qu’il qualifie d’« ambitieux », ne fasse « pas consensus ». Il est tout simplement en train de nous expliquer que c’est grâce à lui que le statut de l’animal pourra évoluer un chouia, car aller au-delà ne pourrait conduire qu’à l’échec. Merci, cher Jean.
Et il a raison, on n’obtiendra pas un vrai statut. Déjà, si l’amendement était pris au pied de la lettre, la chasse à courre, et même la chasse tout court, l’expérimentation animale, les cirques, les zoos, la fourrure, la pêche, le gavage, les élevages intensifs, ces « spectacles » que sont la corrida, publique, et les combats de coqs, planqués — qui dépendent du même alinéa permissif, le 7, de l’article 521-1 du Code pénal —, les delphinariums…, ne pourraient que tomber sous le coup de la loi. L’article punit en effet de deux ans de prison et 30 000 euros d’amende les sévices cruels exercés sur les animaux. Soyez rassurés, agriculteurs et autres inquiets, qui pleurnichez déjà alors que vous n’avez et n’aurez même pas mal, vous n’avez rien à craindre.
On l’a bien compris, cet amendement est juste symbolique. Car M. Glavany a balayé le plus important : les symboles ne souffrent pas. L’individu doué de sensibilité, qu’il soit humain ou animal, si.
7 mai 2014

2. Êtres sensibles : l’arnaque

Et revoilà l’amendement symbolique du PS aficionado Jean Glavany ! Confirmation (premier passage le 15 avril dernier) le 30 octobre à l’Assemblée nationale que les animaux sont « des êtres vivants doués de sensibilité », maintenant reconnus par le Code civil — ils l’étaient déjà dans les Codes pénal et rural. Je ne sais pas vous, mais moi je me demande comment on peut avoir confiance en quelqu’un qui considère la corrida comme faisant partie de la « culture » quand il parle de sensibilité… À moins que l’objectif sous-jacent  ne fût de couper l’herbe sous le pied à la proposition de loi bien plus ambitieuse que préparait Geneviève Gaillard — députée PS des Deux-Sèvres, présidente du groupe d’études Protection des animaux —, et déposée le 5 juin dernier. Fin de la petite réflexion, pas si anodine. Pour en revenir à la proposition, un second passage au Sénat fin novembre 2014, puis retour dans l’hémicycle pour l’adoption finale. Quant à une avancée réelle pour les animaux, oui : dans 10 000 ans.

Les deux amendements de Laurence Abeille1, députée EELV du Val-de-Marne, soutenue par ‪Geneviève Gaillard, ont été rejetés. Abattoirs, expérimentation animale, chasse, fourrure, corrida, cirques, delphinariums, etc. : ça ne change (toujours) rien ! La FNSEA, Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles, qui pleurnichait avant d’avoir mal et qui pratique la désinformation sur la façon scandaleuse dont sont traités les animaux dans les élevages intensifs — osant même parler de « bien-être animal »… —, est soulagée. Et pour cause !
15 novembre 2014

1. politique-animaux.fr/droit-animal/laurence-abeille-denonce-le-poids-des-lobbies-sur-reforme-du-statut-juridique-des-anima (ce lien fonctionne).

3. Non-événement
Mercredi 28 janvier, les animaux ont été définitivement reconnus, symboliquement, comme « doués de sensibilité » — après, faisons-le remarquer, que le Sénat, les « Sages », a refusé de leur accorder ce statut jeudi 22 janvier. Conclusion? Relire 1. et 2., ici même…
Luce Lapin
29 janvier 2015